Il est fréquent lors de mes consultations, qu’un patient se présente pour une difficulté de perte de poids (perte lente, voir stagnation) malgré certaines choses mises en place, sur le plan nutritionnel et activité physique.
Durant la consultation avec le médecin nutritionniste ou diététicienne, il faudra rechercher différents éléments qui peuvent impacter sur cette stagnation pondérale, à l’aide de bilan biologique, examen clinique et surtout interrogatoire/questionnaires nutritionnels.
Voici quelques pistes (non exhaustives) que nous traitons en consultation :
• Le rôle du foie:  De nombreuses études établissent un lien entre surpoids et maladies hépatiques. Parmi les lésions hépatiques observées dans le cadre de l’obésité, on retrouve la stéatose isolée réversible et bénigne, puis l’inflammation hépatique (ou NASH) puis la fibrose, la cirrhose et malheureusement le carcinome hépatocellulaire. Des troubles dans la régulation du métabolisme vont entrainer une accumulation de lipides au niveau des hépatocytes (cellules du foie), qui toucheront l’ensemble des étapes du métabolisme lipidique. La fonction hépatique a un rôle crucial sur le métabolisme :- traitement des lipides ;- détoxification hépatique ;- rôle dans la digestion, etc ; Lorsque tout se passe bien, la formation (« lipogenèse ») et la dégradation (« lipolyse ») des acides gras se trouvent en parfait équilibre. Mais s’il y a un déséquilibre hépatique :- le métabolisme glucidique est accru ;- la vitesse de lipogenèse augmente ;- la vitesse de la lipolyse diminue ;
• Le rôle de l’intestin et du microbiote:  - Le microbiote fabrique un certain nombre de vitamines indispensables au métabolisme énergétique (vitamines K, B1, B2, B3, B5, B6, B8, B9, B12) ;- Il permet également la fabrication des acides gras à chaines courtes comme le butyrate (qui agit comme coupe faim au niveau cérébrale et qui a une action dans la régulation du stockage des graisses) ;- Nous savons que la diminution des « bonnes bactéries » est associée à une tendance à prendre du poids et entraine un dysfonctionnement de l’insuline par manque de fabrication d’une hormone qui participe à la régulation de l’insuline --> insulinorésistance (dosé en biologie par le score « HOMA ») --> facteur de prise de poids ;- L’augmentation des « mauvaises bactéries » est associée à des troubles du comportement (dépression, anxiété) pour générer des comportements compensatoires/pulsions alimentaires, générant une prise de poids ; La répartition et la diversité bactérienne sont différentes chez une personne obèse versus une personne mince !(Faible concentration de bactérioses, abondances des firmicutes et actinobactéries, faible diversité bactérienne)
• L’aspect psychique/nerveux:  Il y a bien entendu beaucoup de facteurs nerveux qui influent sur la prise de poids : en voici quelques-uns.- Déficit en sérotonine : irritabilité, impulsivité, agacement, manque d’apaisement… + mise en place de mécanismes compensateurs (pulsions alimentaires). Des études ont notamment montré que le système sérotoninergique joue un rôle important dans la sélection des macronutriments et notamment des glucides : un statut optimal en sérotonine (induit par un médicament) ou en 5-htp, est associé à une réduction de la consommation d’aliments riches en glucides--> diminution de l’apport alimentaire--> perte de poids ;- Déficit en dopamine : perte de motivation, perte d’envie, perte de plaisir… Elle a un impact sur le circuit de la récompense et son dérèglement peut entrainer des troubles du comportement alimentaire. (Une étude a montré que les personnes obèses possèdent moins de récepteurs à dopamine D2 ce qui les rendent moins sensibles aux stimulis de récompense et donc plus vulnérables aux apports alimentaires) ;- Excès de cortisol : de façon périphérique, le cortisol agit comme un signal pour nos cellules graisseuses. Il leur demande de conserver plus de graisses et d’en libérer aussi peu que possible. Des déficits en dopamine et en sérotonine induisent des modifications du comportement alimentaire. Le stress chronique entraine un excès de cortisol, une chute de dopamine puis de sérotonine. Un régime restreint en glucides entraine une déplétion de sérotonine. Tous ces paramètres peuvent amener à une prise de poids ou à une difficulté à en perdre.
• Un état d’acidose métabolique de bas grade:  Un déséquilibre acido-basique est associé à une augmentation du poids et du tour de taille. De plus, l’acidose métabolique latente est un facteur de risque d’insulinorésistance qui peut entraine un surpoids. Dans le cadre d’une perte de poids, le maintien d’un équilibre acido-basique est incontournable :- pour le maintien de la masse musculaire ;- pour favoriser la lipolyse et éviter les résistances à la perte de poids ;- pour lutter contre la rétention d’eau ;- pour compenser l’acidose métabolique latente qui peut entrainer une perte de poids via la fabrication des corps cétoniques ;
• Un déficit en oméga 3:  Il est important d’équilibre la balance oméga6/oméga3 :- un excès d’oméga 6 stimulent la multiplication des adipocytes ;- Apporter des omégas 3 permet d’empêcher cette multiplication ; Les omégas 3 facilitent l’utilisation des graisses comme carburant énergétique ;Un déficit en oméga 3 peut donc potentiellement bloquer ou ralentir la perte de poids lors d’un régime hypocalorique.
• L’insulinorésistance (excès d’insuline) : Elle contribue à une prise de poids car l’insuline est l’hormone de la lipogenèse. Elle contribue également à la résistance à la perte de poids. • Un ralentissement de la fonction thyroïdienne:  Aujourd’hui, des études mettent en évidence que même un léger décalage des valeurs de TSH par rapport à la normale peut avoir des conséquences importantes sur la santé. Selon la société française d’Endocrinologie, les normes relatives à 95ème percentiles des sujets témoins sans goitre ni antécédents de pathologie thyroïdienne, sans anticorps antithyroïdiens détectables et sans médicaments pouvant interférer avec la fonction thyroïdienne, se situent entre 0,4 et 2,5 mUI/l.Si le débat se poursuit, plusieurs groupes de médecins estiment que la TSH ne devrait guère s’écarter de la valeur de 1,5mUI/L. Dans un état d’hypothyroïdie, un syndrome d’hypo métabolisme se met en place : asthénie physique et psycho-intellectuelle, somnolence, hypothermie, frilosité acquise, constipation acquise, bradycardie, prise de poids modeste contrastant parfois avec une perte d’appétit.
• Une Hyperoestrogénie relative:  -> excès relatif d’œstrogènes par rapport à la progestérone, renforcé ou non par un défaut de progestérone (insuffisance lutéale). Plusieurs causes peuvent en être à l’origine :- déséquilibre de la sphère hépato-digestive ;- traitements hormonaux ;- perturbateurs endocriniens ;- stress prolongé ;- inflammation ;- pré-ménopause L’hyperoestrogénie relative va favoriser la prise de poids et potentiellement entrainer des résistances à la perte de poids, par une rétention d’eau et en menant à un état d’hypothyroïdie donc à un ralentissement du métabolisme. Un IMC élevé est un important facteur de risque de troubles gynécologiques dont l’hyeroestrogénie. Et bien d’autres causes (médicamenteuses, désynchronisation du rythme circadien/trouble du sommeil important, baisse de sensibilité des entérohormones orexigènes et anorexigènes traduisant une perturbation des sensations de faim, satiété : on dosera alors la ghréline ou leptine, GLP-1, etc). L’ensemble de ces éléments sera donc étudié en consultation pour proposer au patient une prise en charge la plus adaptée possible dans son accompagnement à la perte de poids.